La psychiatrie racontée en poésie...
PARTIR A LA RECHERCHE… (THERAPIE !)
Pour Juliette H.
Partir à la recherche,
Oser fouiller l’obscur
Tâtonner, avancer
Et puis faire demi-tour
Repartir en avant par l’impérieux désir
De changer quelque chose et de sortir du flou
Trou noir, gangue exiguë, piège de goudron tiède
Primo, état des lieux : terrain tout craquelé
Assoiffé, caillouteux, ceint de fils barbelés…
Dégager les abords… Se faire aider peut-être !
Commencer à n’importe quelle heure
C’est un travail de laboureur…
Charrue… sol retourné
Introspection, action
Inspire, expiration…
Déterrer les pierres monstrueuses
Trier puis écarter, encore recommencer
Encore, encore, buter, soulever, avancer…
Rendre le sol souple et riche de promesses…
Etape incontournable
Qui alterne joie et tristesse…
Puis le temps et l’espace s’offrent pour des semailles
Germes multicolores…terre… air… eau… épousailles
Beaucoup de jours, de nuits, de soins, de liberté
Moins de mélancolie et plus d’heures de gaieté !
Continuer, fidèle à ôter pierres et ronces…
Pour la moisson c’est quand on veut
Par-ci, par-là, un petit peu
Ou alors tout d’un coup…
Des gerbes plein les bras, créer des bouquets fous
Faire du pain croustillant, goûter à tout…
Mais…
Garder des grains pour le futur
Débroussailler, bêcher puis réensemencer
La terre indispensable vivante et amicale
Ne jamais s’arrêter tout à fait…
Essayer… plusieurs fois…
Marie-Laure MARIN-THIBAULT
2004
HOPITAL PSYCHIATRIQUE
Cela fait plus d’un mois que je suis enfermée
Comme dans une prison faite en béton armé
Au début, même la porte avait un tour de clé
Rien à dire, sans sonnette, j’étais vraiment bouclée !
Mes appels au secours pour pouvoir discuter
Sont restés sans effets. Or moi j’aurais souhaité
Parler encore, encore… dire mon bonheur de vivre
Laisser clamer ma joie et l’amour qui enivre
Or les psy-machin-chose et leurs médicaments
Ne laissent pas le choix et imposent carrément
De rentrer dans la norme sans faire aucune vague
« Cesse d’être excessive, tu vois bien, tu divagues ! »
Non ! Je suis enjouée, c’est ma nature profonde
Mais tous les médecins préfèrent que j’me morfonde
Alors j’ai tout subi, contre ma volonté
Ce fut vraiment terrible… Je vais vous raconter :
La toute dernière fois, j’avais mal à la langue
Manger était horrible, je devenais exsangue
La douleur était telle que j’étais excitée
Les nerfs à fleur de peau, je pleurais, irritée
J’voulais qu’on me soulage… ils n’ont vu que ma crise…
J’ai appelé à l’aide… et à trois, ils m’ont prise
Et ils m’ont attachés les chevilles et les mains
Ainsi que le thorax… Etait-ce bien humain ?
Je me suis vue mourir du pouvoir des soignants…
Mais mon étoile filante protégeait sa maman
Ce n’était pas mon heure… Et je suis toujours là
A me ronger les freins, rêvant de chocolat
Vivement la sortie de cette psychiatrie
Où je n’ai pas ma place, où je me sens meurtrie
Où j’avale de force, maints cachets dangereux
Qui sont trop forts pour moi et qui sont onéreux.
Heureus’ment que la vie triomphera quand même
Et que tous mes malheurs resteront des poèmes.
Marie-Laure MARIN-THIBAULT
Juillet 2009